Ancien membre de l’Ecole Française d’Athènes, où ses premiers travaux sur les sites de Daphni, Mistra et du Mont-Athos orientent ses recherches sur les arts chrétiens d’Orient, Gabriel Millet est nommé maître de conférences à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes en 1899, puis directeur d’études jusqu’en 1935. Il y fonde le premier séminaire de Christianisme byzantin et archéologie chrétienne de la Section des sciences religieuses. Afin de favoriser l’enseignement, les recherches et les analyses comparatives, il rassemble à l’EPHE une documentation considérable, au fil de ses propres travaux et voyages, sur les arts chrétiens d’Italie, des Balkans, du Caucase, de la Russie, de l’Anatolie et de la Cappadoce, de Chypre, de Syrie, d’Égypte, de Nubie et d’Éthiopie. Conservée et augmentée depuis son legs à l’EPHE en 1938, cette singulière collection se compose de moulages, d' objets archéologiques, et de documents graphiques, parmi lesquels les photographies tiennent une place majeure. Celles-ci donnent ainsi à voir édifices et peintures, manuscrits et arts somptuaires, paysages et vie monastique sur toute l’aire de rayonnement de l’empire byzantin.
La collection des photographies de l’EPHE-PSL reflète le savant passionné que fut son fondateur mais aussi son réseau d’érudits et d’archéologues, tel Jean Clédat et Guillaume de Jerphanion, Théophile Homolle ou Jean Pedrizet. Les photographies dont ils sont les auteurs, qui ont enrichi la collection dès sa création, parmi celles d’auteurs et opérateurs anonymes ou non identifiés, offrent un panorama de l’archéologie chrétienne et médiévale à travers le monde méditerranéen et le Proche-Orient. Malgré les imperfections et les incertitudes qui demeurent, ces photographies ouvrent des perspectives prometteuses d’étude et de comparaison avec des ressources numérisées, et invitent à l’immersion dans un passé désormais virtuellement accessible.
Sur quatre formats différents (A, B, C, D), ces plaques de verre ont une valeur double, documentaire et matérielle. Les vues de monuments, de sites et de paysages qui ont depuis évolué – s’ils n’ont pas disparu – ainsi que les instants saisis avec la sensibilité et l’aptitude de leur auteur révèlent un monde en mutation entre la fin du XIXe siècle et l’entre-deux guerres. Les plaques de verre, parfois obtenues à partir de tirages papier pour la reproduction et la conservation des documents, sont elles-mêmes des objets photographiques à part entière, dans leur matérialité propre et leur fragilité, révélateurs des efforts et des recherches techniques pour reproduire, améliorer, manier les images.
Les Archives du Collège de France, que Gabriel Millet a rejoint en 1926 comme titulaire de la chaire d'esthétique et d'histoire de l'art, conservent une documentation complémentaire des fonds de l’EPHE , en particulier sur le Mont-Athos, ainsi que des préparations de cours, des carnets de notes ou des correspondances (inventaire du fonds Millet sur Salamandre). La collection ici présentée permet ainsi de réunir virtuellement deux corpus séparés dans leur conservation mais intrinsèquement liés par leur histoire et leur origine.
La numérisation de l’ensemble des plaques de verre, issues conjointement des fonds de l’EPHE et du Collège de France, a été rendue possible grâce au projet « Histoire des Sciences et des Arts » porté par PSL et soutenu par la Région Ile-de-France dans le cadre du programme SUSES. Le travail d’identification et de vérification a été mené avec la collaboration scientifique de plusieurs jeunes chercheurs : Lilyana Yordanova, Héléna Rochard, Maria Chronopoulou, Véronique Petiteau, François Pacha Miran et Pierre Charrey. Une révision d’ensemble réalisée grâce à l’aide de Collex-Persée pour le projet REVIS permet de mettre en ligne, en un premier temps, les images dont le sujet est identifié avec certitude.